Dernière minute: Le dosage du mercure dans le sang et l’urine n’ont aucune signification!
On peut lire dans le périodique scientifique allemand Zeitschrift für Umweltmedizin (Heft 4/2001, p.204) le compte rendu d’une étude réalisée sur 120 travailleurs de mines d’or aux Philippines. Celle-ci consiste en des dosages de mercure dans le sang et l’urine de ces travailleurs pendant une année. Elle apporte un éclairage neuf dans le débat concernant la mise en évidence de l’intoxication mercurielle par des tests analytiques.
L’or est extrait par amalgamation
Un quart de l’or produit aujourd’hui dans le monde est, dans le tiers monde, extrait du minerai de manière très primitive, au moyen de mercure. Lorsque quelques particules d’or subsistent encore dans le minerai, il est rentable de pulvériser ce minerai, puis de le triturer avec de l’eau et d’y ajouter ensuite du mercure métallique. On ajoute en général environ 5 grammes de mercure par gramme d’or. L’amalgame ainsi formé se sépare en glomérules lourds.
Pour isoler l’or, on soumet ces masses d’amalgame à la flamme d’une lampe à souder. Le mercure est vaporisé et l’or non volatil reforme des pépites. Le mercure toxique se disperse partout dans l’atmosphère puis dans l’eau et aboutit dans la chaîne alimentaire principalement via les poissons chargés en mercure dans ces zones littorales.
L’Organisation du Développement Industriel des Nations Unies (UNIDO) a chargé le Prof. Gustav Drasch et Stefan Böse-O’Reilly de mettre en oeuvre une étude épidémiologique ciblée sur les travailleurs des mines d’or de l’Ile de Mindanao.
Les travailleurs des mines d’or subissent depuis des années une intoxication importante. Parmi les 15.000 habitants des villages philippins de Mount Diwata, sur l’Ile de Mindanao, 71,6 % des travailleurs et 27 % de la population générale sont intoxiqués par le mercure. Les tremblements, l’ataxie, les troubles de coordination motrice et les difficultés d’élocution sont des symptômes très fréquents décrits par le médecin spécialiste de l’environnement le Dr. Stefan Böse-O’Reilly.
Le prof. G. Drasch et S. Böse-O’Reilly ont ainsi observé pendant un an 120 travailleurs des mines d’or et cela a conduit à des résultats plutôt inattendus.
La conclusion globale fut : “Les valeurs sont beaucoup trop dispersées. Chez certains, elles étaient d’abord très élevées, puis faibles une année plus tard. Et, inversement, les valeurs de concentrations sanguines et urinaires peuvent indiquer des valeurs plus faibles, mais les symptômes restent les mêmes”
En plus de soulever le problème de la pollution globale de la biosphère, l’étude peut apporter dans nos pays un certain éclairage dans le débat concernant les valeurs limites et les valeurs directrices de concentrations admissibles en mercure.
On ne peut pas établir un seuil de non-effet
Cette étude montre que certains travailleurs ont beaucoup de mercure dans le sang et/ou dans l’urine et ne présentent aucun symptôme, tandis que d’autres présentent la symptomatique totale de l’intoxication mercurielle et ont peu de mercure dans le sang et/ou dans l’urine.
Le Prof. Gustav Drasch (de l’Institut de Médecine légale de l’Université de Munich) déclare: “Nous avions pensé que les études sur les mineurs philippins auraient pu permettre d’établir un seuil de non-effet pour le mercure. Mais cela n’a pas pu être réalisé. Il y avait assez de personnes présentant une symptomatique claire, mais dont les concentrations en mercure dans le sang et dans l’urine étaient largement en dessous des valeurs HBM II.”
Drasch ajoute: “Pour un collectif, ce modèle de surveillance toxicologique humaine pourrait trouver sa justification, mais on ne peut rien conclure face à un cas isolé. Les concentrations dans le sang et l’urine ne sont à son avis pas des indicateurs valables de surveillance biologique humaine pour évaluer une charge toxique en mercure. Alors le fait qu’il pourrait exister un équilibre entre la charge mercurielle du sang et/ou de l’urine et l’absorption devient plus un vœu pieux qu’une réalité. Ce sont les neurones du cerveau qui sont les organes-cibles les mieux adaptés pour se prêter à des mesures, mais celles-ci sont irréalisables au cours de la vie.”
Une image du sang qui ne reflète rien
Globalement G. Drasch estime que l’interprétation des valeurs de concentration en mercure dans le sang et dans l’urine est périlleuse, contrairement à ce qui peut se faire avec le plomb. Les concentrations en plomb dans le sang sont plus stables. Une image de concentration en mercure dans le sang ne reflète rien du tout!
G. Drasch indique que la foi dans les chiffres fait négliger la notion de sensibilité individuelle. Il met en garde contre l’argument qui consisterait à dire que quelqu’un qui présenterait une symptomatique claire d’intoxication mercurielle pourrait être considéré comme étant en bon état lorsque les valeurs de concentration dans le sang et/ou dans l’urine sont en dessous de la valeur HBM II.
Les valeurs HBM II ne devraient donc pas être maintenues sur le plan légal, ajoute le praticien de médecine légale.
G. Drasch ajoute clairement: “Prenez le cas des victimes des amalgames. Certaines de ces personnes arrivent avec des résultats purement subjectifs d’examens, lesquels ne sont pas objectivables. Il est très grave d’affirmer que cela n’est rien, parce que cela ne peut rien être!”
Il faut donc lancer un débat concernant une valeur limite et la question qui en découle est : “Existe-t’il une concentration en mercure en dessous de laquelle aucun effet préjudiciable ne se manifeste plus?”
Adresse des auteurs: Prof. Gustav Drasch, Institut für Rechtsmedizin der Ludwig Maximilians-Universität, München, R.F.A.
Ce document de dernière minute confirme donc de façon péremptoire l’argumentation des études de l’Université de Kiel et de l’Université de Tübingen et rend complètement caduques les arguties de ceux qui prétendent n’avoir jamais perçu de signes d’intoxication mercurielle dans les analyses de sang ou d’urine des porteurs d’amalgames dentaires.