Les téléphones mobiles cassent les filaments d’ADN et dégradent les génomes
Communiqué de Presse de l’Institut des Sciences dans la Société
(The Institut of Science in Society) – 17. 01. 2005
Un nouveau rapport d’une étude étendue à l’Union Européenne confirme les risques de l’exposition aux rayonnements électromagnétiques, mais ne démontre pas les risques pour la santé. « Donc, à quoi sert cette recherche ? », demandent le Dr. Mae Wan Ho etle Prof. Peter Saunders.
Les sources de cet article sont sur le site http://www.i-sis.org.uk
Les enfants âgés de moins de 8 ans ne devraient plus utiliser de téléphone mobile et ceux dont l’âge est compris entre 8 et 14 ans ne devraient les utiliser qu’en cas d’absolue nécessité. C’est ce que déclare à titre de mise en garde le Prof. William stewart, Président du Bureau National Britannique de Protection contre les Radiations (NRPB). Le Prof. Stewart a formulé la même mise en garde il y a cinq ans, lorsqu’il présidait une enquête ayant abouti au « Rapport Stewart concernant les Téléphones Mobiles et la Santé ». Mais, ce conseil a été ignoré. Un enfant sur quatre dont l’âge est compris entre 7 et 10 ans possède maintenant un téléphone mobile, c’est-à-dire deux fois plus qu’en 2001.
Dans un nouveau rapport publié le 12 janvier 2005, Le Prof. W. Stewart ne se contente pas de répéter sa mise en garde indiquant que enfants courent le plus de risques, mais il demande une révision du processus de déploiement des stations de base. Il a été dit qu’il a fait état de nouvelles preuves suggérant qu’il puisse exister des implications possibles pour la santé.
Cette preuve est issue d’une étude étendue à toute l’Europe au cours de ces quatre dernières années, laquelle une fois de plus n’aurait pas prouvé que les champs électromagnétiques émis par les téléphones mobiles ainsi que par d’autres sources soient des risques pour la santé. Néanmoins ceci a rendu W. Stewart « plus concerné » qu’il y a cinq ans, bien qu’il ait estimé que cela ne soit pas suffisant pour recommander une action plus décisive.
Quelle science faut-il financer ?
Pourquoi les débats concernant la sécurité des nouvelles technologies, comme les organismes génétiquement modifiés et la téléphonie mobile se prolongent-ils? Pourquoi les conclusions ne semblent-elles jamais établies – pour autant qu’en sciences, rien ne puisse être définitivement établi – avant que les produits soient mis sur le marché ? C’est au moins en partie parce qu’en premier lieu nous manquons à la fois des critères explicites du financement de la recherche scientifique – par exemple pour déterminer s’il est sain, éthique et s’il apporte une contribution réelle à la société – et d’un système d’audit pour vérifier l’efficacité de nos dépenses en recherche et développement.
Par conséquent, la recherche concernant la sécurité des nouvelles technologies n’est mise en œuvre que longtemps après que celles-ci soient mises sur le marché, à condition que finalement elle se fasse. A ce stade, évidemment, l’industrie a investi de grandes quantités de capitaux et il s’exerce une forte pression sur les scientifiques et sur le législateurs pour qu’ils ne fassent pas courir des risques à ces investissements. Au lieu d’appliquer le « principe de précaution », en vertu duquel les développements ne devraient pas être mis en œuvre avant que l’on ait acquis la conviction qu’ils soient sûrs, au delà d’un doute scientifique raisonnable, les législateurs appliquent le « principe d’anti-précaution » qui requiert des preuves concluantes de nuisances avant que toute action puisse se justifier. Ce n’est pas dans l’intérêt public de dissimuler la charge de la preuve de cette manière, mais c’est finalement trop vraisemblablement ce qui va se produire lorsque tant d’argent est en jeu.
Nous devrions disposer de recherches orientées vers la sécurité longtemps avant que de grandes dépenses soient faites pour le développement du produit. Et les scientifiques que nous financerions devraient répondre à des questions approfondies et mener des expérimentations apportant des réponses claires concernant à la fois les risques pour la santé et les mécanismes de base qui trop souvent ne sont pas compris.
Malheureusement l’étude étendue à toute l’Europe, concernant les effets biologiques des champs électromagnétiques ne satisfait à aucun de ces critères.
Une étude majeure sans conséquence…
L’étude européenne extensive récente, connue sous le nom de « REFLEX » a découvert que les radiations émises par les téléphones mobiles cassent les filaments d’ADN dans les cellules humaines. Mais, selon le rapport final de 259 pages, ceci ne signifierait pas que les téléphones mobiles soient dangereux pour la santé.
L’étude a impliqué 12 groupes de recherche dans 7 pays européens entre 2000 et 2004. Cela a coûté plus de 3 millions d’Euros (2.059.450 Euros de l’Union Européenne, 506.774 Euros du Gouvernement suisse, 191.265 Euros du Gouvernement finlandais et 522.629 Euros de la Fondation Verum en Allemagne). Les équipes ont étudié les champs électromagnétiques de la plage des extrêmement basses fréquences (ELF) produits par les réseaux et les appareils électriques, ainsi que la plage des champs des fréquences radio émis par les téléphones mobiles. Une grande attention a été accordée à la standardisation des expositions aux équipements et aux normes, ainsi qu’à d’autres contrôles de qualité.
On aurait pu s’attendre à ce que dans une étude d’une telle importance, des efforts concertés aient pu produire des réponses plus définitives en matière de sécurité. Il n’en fut rien.
Un défaut de conception et d’étendue
Les laboratoires ont dirigé leurs études sur les cellules et ont recherché les effets aigus sur des molécules après exposition de courte durée, de 6 à 24 heures ou tout au plus de quelques jours, aux champs électromagnétiques. Les effets d’expositions à long terme n’ont pas été étudiés. De plus, les chercheurs se sont focalisés sur des intensités de champs se situant aux alentours des limites supérieures d’exposition (environ 1 mT(1)pour les extrêmement basses fréquences et un taux d’absorption spécifique –SAR- de 2 Watts/kg pour les tréquences radio. Beaucoup de scientifiques considèrent que ces valeurs sont beaucoup trop élevées car elles sont destinées à éviter un échauffement excessif des tissus vivants, plutôt que des effets non thermiques comme ceux qui provoquent des ruptures d’ADN.
Néanmoins, plusieurs équipes ont mis en évidence des ruptures significatives de filaments d’ADN parmi des cellules humaines et animales à des niveaux d’exposition loin en dessous des valeurs limites officielles. Les ruptures d’ADN ont été observées après 15 heures d’exposition à des champs électromagnétiques à extrêmement basses fréquences (ELF) de 35 microtesla (= 350 mG), et après 18 heures d’exposition à 20 microteslas ( = 200 mG). De manière similaire, pour la plage des fréquences radio, des ruptures d’ADN ainsi que des aberrations chromosomiques ont été observées a un niveau de SAR de 0,3 W/Kg.
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(1) 1 mT = 10.000 mG
Cette unique constatation révèle la futilité de l’entièreté de l’exercice. Les expériences ont été réalisées in vitro. On nous dit maintenant que selon les expérimentateurs, aucun résultat d’expérience in vitro, – c’est-à-dire aucune conclusion concevable des ces expériences – n’aurait pu infirmer qu’il puisse exister un risque pour la santé. Pourquoi alors ont ils réalisé ces expériences ? Pourquoi ont-ils trouvé la justification pour demander aux contribuables européens de financer leurs travaux à titre de contribution à la santé publique ?
Qui bénéficie de ces recherches ?
Tout en niant que les résultats de ces recherches puissent nous expliquer quoi que ce soit à propos des risques pour la santé, le coordinateur des études, Franz Adlkofer de la Fondation VERUM déconseillait l’usage des téléphones mobiles lorsque des téléphones fixes sont disponibles et il recommandait en outre d’utiliser un téléphone muni d’un kit « mains libres » lorsque c’est possible. « Nous ne voulons pas créer de panique, mais il est souhaitable de prendre des précautions » a-t’il déclaré en ajoutant que les recherches complémentaires nécessaires prendront encore quatre ou cinq ans.
Ceci convient très bien aux industriels de la téléphonie mobile qui gagnent 100 billions de dollars par an. Ils ont en effet insisté sur le fait qu’aucune preuve d’effet nuisible des champs électromagnétiques n’a été apportée. Environ 1;5 billions de personnes dans le monde utilisent maintenant des téléphones mobiles et on s’attend à ce que 650 millions de téléphones mobiles aient été vendus l’année dernière. Le coordinateur des études est clairement concerné par les risques possibles, mais pas au point de suggérer que l’industrie fasse quelque chose à ce sujet, même pas une campagne pour alerter le public afin qu’il puisse se faire une idée.
En disant que puisqu’ils n’ont pas été capables de tirer des conclusions, les scientifiques peuvent espérer un nouveau budget pour les quatre ou cinq prochaines années. Mais puisque leurs recherches ne nous ont rien enseigné de nouveau et étaient destinées à ne rien nous dire de neuf, pourquoi devrions nous continuer à payer? De plus, les résultats sont déjà suffisamment préoccupants, même si ce qu’ils apporte ne fait que confirmer ce que nous savons déjà.
Nos craintes sont confirmées
En dépit de ses limites, l’étude REFLEX a confirmé des découvertes importantes déjà rapportées dans la littérature scientifique. Henri Lai et Narenda Singh à l’Université de Washington, Seattle, USA, parmi d’autres, ont détecté des ruptures de filaments d’ADN dans des cellules de cerveau de rats exposés à des champs de micro-ondes bien plus faibles et ce, déjà depuis les années 1990. Leurs résultats ont été confirmés dans plusieurs autres laboratoires.
L’étude REFLEX a également découvert que l’exposition à des champs électromagnétiques, à la fois dans la plage des extrêmement basses fréquences (ELF) et dans la plage des fréquences radio (RF), induit des augmentations significatives d’aberrations chromosomiques dans les fibroblastes humains (cellules de la peau); il s’agit d’intervalles, de ruptures, de chromosomes dicentriques (deux centromères) et de chromosomes fragmentés. Les intervalles augmentent de 4 fois, les ruptures de 2 fois, les chromosomes dicentriques et les fragments acentriques de 10 fois. L’exposition aux extrêmement basses fréquences (ELF) et aux fréquences radio (RF) induit une même incidence plus élevée d’intervalles et de ruptures chromosomiques ainsi que de chromosomes dicentriques et de fragments acentriques (100 fois plus). Ces aberrations chromosomiques ont également été observées antérieurement (consulter le site http://www.i-sis.org.uk – SiS 17) et sont maintenant considérées comme le signe d’une instabilité du génome, liée au cancer, par un nombre important de scientifiques.
En effet, l’étude REFLEX a découvert que les champs électromagnétiques à extrêmement basses fréquences (ELF) exalte la promotion de la croissance des cellules de neuroblastomes humains, aux environs de 12 % après 48 heures d’exposition à 10 microteslas(1) et de 17 % à 100 microteslas, bien que des expositions plus longues de 90 heures n’indiquent pas d’effet, peut-être parce que les cellules auraient atteint un état auquel elles arrêtent leurs divisions et ne seraient donc plus sensibles aux champs électromagnétiques.
La promotion de la croissance due à l’effet de l’exposition aux champs électromagnétiques est d’une importance particulière quant aux preuves épidémiologiques mettant en relation les champs électromagnétiques 50 / 60 Hz avec les leucémies infantiles et d’autres cancers (voir « Electromagnetic fields double leukaemia risks » et « Non thermal effects », SiS 17; « Electromagnetic fields, leukaemia and DNA damage », SiS23). L’exposition des cellules leucémiques à des champs électromagnétiques de la plage des fréquences radio pendant 48 heures a provoqué leur multiplication agressive, dépassant les signaux déclenchant la mort de ces cellules (voir « Mobile phone & Cancer », SiS17).
Mécanismes toujours incompris
Selon sa propre opinion, l’étude REFLEX a contribué un peu à définir les risques pour la santé des champs électromagnétiques. A-t’elle contribué à la compréhension des mécanismes de base des effets biologiques à des niveaux d’intensité non thermiques? Réellement non. Les explorations sur les génomes et sur la configuration des protéines a mis en évidence beaucoup de gènes et des protéines « sur-régulées » ou « sous-régulées », dont la signification reste inconnue jusqu’à ce que et à moins que la plage normale de fluctuation puisse être établie.
Le rapport met en exergue page 194 : « Les mécanismes d’action induite par les expositions électromagnétiques à extrêmement basses fréquences (ELF) sur des cellules vivantes ne sont pas encore connus. ». Pour les champs électromagnétiques à hautes fréquences (RF), il est suggéré que « l’augmentation de la production de radicaux libres » soit responsable des dégâts à l’ADN. Cette suggestion n’a non plus rien de neuf et a été formulée antérieurement par beaucoup d’autres chercheurs. De plus, la question de la manière dont les champs électromagnétiques pourraient augmenter la formation et l’activité des radicaux libres n’entre pas réellement dans l’objet de la recherche, laquelle nécessite l’implication de la physique et de méthodes physiques d’approche, non incluses dans l’étude REFLEX (voir « Mobile phones turn enzyme solution into gel » SiS17).
Un manquement dans la recherche de marché et l’éducation
Il est intéressant de constater que le rapport REFLEX est préfacé par un texte du Prof. William Ross Adey, décédé le 20 mai 2004. « W. Ross Adey a apporté de nombreuses contributions à la science émergente des effets biologiques des champs électromagnétiques ».
W.R. Adey a résumé avec à propos pourquoi de tellement faibles progrès ont été réalisés dans la recherche concernant les effets biologiques des champs électromagnétiques : « L’histoire de l’électromagnétisme regroupe une quantité de problèmes qui surviennent chaque fois qu’une communauté de sciences est confrontée avec une limite qui s’enfonce profondément dans les orthodoxies établies de la biologie, des sciences physiques et de l’ingéniérie. Ces conflits se sont révélés de plus en plus aigus lorsque de nouvelles connaissances dans la recherche bioélectromagnétique se sont opposées à la sagesse conventionnelle dans chaque partie de sa trinité.
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(1) 10 µT = 1000 mG ; 100 µT = 10.000 mG.
La norme que l’Organisation Mondiale de la Santé (M. Repacholi) veut imposer à la planète est 100 µT
Au cours des 20 dernières années, en aucun point l’école de l’éducation publique n’a fait en sorte qu’une majorité de citoyens ait une compréhension élémentaire des appareillages et systèmes sophistiqués de communication, tels que les téléphones, la radio et la télévision. De manière similaire, l’ingéniérie automobile demeure un océan de vaste ignorance pour la plupart des utilisateurs. De telles connaissances ne sont pas considérées comme adéquates ni nécessaires. En résumé, nous sommes devenus des utilisateurs superstitieux d’une quantité sans cesse croissante de technologies, mais nous sommes maintenant incapables d’échapper au tissu qu’elles ont tissé autour de nous ».
Le remède qu’il recommandait était qu’il existât une instruction formelle en physique théorique et appliquée pour ceux qui entreprendraient une carrière en recherche médicale. Il aurait pu ajouter que les physiciens reçoivent un enseignement de biologie. Cela a pris beaucoup trop longtemps avant que des physiciens comprennent que les champs électromagnétiques peuvent faire beaucoup plus au cellules que les échauffer un tant soit peu.
Traduction J.M. Danze