Principe de précaution
Le Principe de Précaution, tel qu’il a été repris dans le Traité de Maastricht et dans le Traité d’Amsterdam, nous indique beaucoup de choses. Nous vous présentons les textes publiés, d’une part, dans « Le Dalloz », n° 41 de 1999, qui fait référence en matière de Droit Français et, d’autre part, dans le « Journal des Tribunaux », n°5898 du 17 octobre 1998, qui fait référence en matière de droit belge.
Dans « Le Dalloz », nous pouvons lire : « Le principe de précaution implique de se prémunir même contre l’incertain… La seule probabilité de l’existence d’un risque impose, dans une telle optique, la prudence… Attendre, comme le suppose une politique de prévention que le risque soit identifié pour se prémunir conduit à une certaine lenteur qui peut produire le pire… La logique de précaution, qui est, avant tout, une logique de sécurité, a pour dessein premier de responsabiliser davantage ceux qui introduisent le risque. Elle s’apparente à une forme de comportement qui vise à instruire un certain type de prise de décision en situation d’incertitude. Au regard d’une telle vocation, elle fait sienne la maxime : «dans le doute, abstiens-toi»… Si jusqu’ici, il était attendu d’une décision publique qu’elle soit nécessairement fondée sur des données scientifiques acquises, avec le Principe de Précaution, cette exigence ne sera plus de mise. »
Dans le « Journal des Tribunaux », nous pouvons lire : « Le défaut de précaution conçu comme faute contre la sécurité sera reproché à celui qui connaissait ou ne pouvait ignorer l’existence d’un danger, mais qui n’a pas pris les précautions nécessaires pour éviter un dommage… Le Principe de Précaution peut alors justifier ou même rendre obligatoire, l’action des pouvoirs publics visant à prévenir un dommage éventuel par le contrôle ou la restriction d’une activité donnée, même lorsqu’il n’existe aucune certitude actuelle quant à la possibilité de conséquences préjudiciables entraînées par cette activité… »
L’Arrêt du Conseil d’Etat Belge n°85.836, du 6 mars 2000, va dans ce sens. On peut y lire, page 9 : « Considérant qu’il ressort des documents versés aux débats que l’influence des ondes provoquées par une antenne de téléphonie mobile fait l’objet de controverses dans les milieux médicaux, qu’il n’appartient pas au Conseil d’Etat de trancher une telle controverse, on peut seulement constater qu’il existe des éléments permettant raisonnablement de suspecter un risque pour la santé, quand bien même les normes existant ou projetées en cette matière seraient largement respectées; que si ce risque ne peut être affirmé avec certitude, il ne peut non plus être exclu, que pour que le Conseil d’Etat puisse suspendre un acte attaqué, le préjudice ne doit pas être certain, qu’il suffit que le risque de préjudice soit plausible, qu’il en va ainsi en l’espèce comme il résulte notamment de la réponse donnée par le ministre compétent à une question parlementaire, indiquant que l’on interdisait de placer de telles antennes à proximité d’écoles, d’hôpitaux, de maisons de repos, que le risque en cause pèse à la fois sur le droit à la protection de la santé protégé par l’article 23, alinéa 3, 2° de la Constitution et sur le droit à la protection d’un environnement sain protégé par le 3° du même alinéa… Considérant que, ayant trait à des droits fondamentaux, le préjudice dont le risque doit être considéré comme établi, est grave, qu’il est, par nature, difficilement réparable… ».
Le 15 décembre 2004, le Conseil d’Etat belge a tout simplement annulé l’Arrêté Royal du 29 avril 2001 fixant la norme de 20,6 V/m en 900 MHz et de 29,1 V/m en 1.800 MHz pour les antennes émettant des ondes électroagnétiques en hyperfréquences.
Il convient de rapeller que des associations comme l’asbl “Teslabel” de défense des riverains avait introduit depuis le 20 juillet 2001, un recours devant le CE demandant l’annulation de cet Arrêté Royal !
En 1999, la France a pris une position allant dans le sens de l’application du Principe de Précaution. En effet, une lettre du Directeur de la Santé et une circulaire du Secrétaire d’Etat au Logement, de 1999, traitant des « installations de stations de base de téléphonie mobile sur des balcons d’immeubles HLM [1] » :
- soulignent la nécessité de s’entourer de précautions avant d’implanter de nouvelles stations relais de téléphones mobiles cellulaires,
- demandent que des mesures de champs électromagnétiques soient effectuées dans l’environnement des stations relais existantes,
- précisent que « l’adoption de ces dispositions devrait conduire à la remise en cause d’installations non conformes, ou, lorsque les émetteurs sont fixés sur des balcons, à une restriction d’usage totale ou partielle de ces balcons voire dans certains cas, à une condamnation de certaines pièces d’habitation ».
- souhaitent, au regard de ce qui précède, que les mesures de protection prises pour les populations résidant en HLM soient étendues à l’ensemble des logements individuels et collectifs et cela conformément au Principe de Précaution.
En Belgique, plusieurs communes principalement en Province de Luxembourg appliquent le Principe de Précaution pour l’exposition des populations aux antennes relais de téléphones cellulaires. Voici deux exemples de communes :
La commune d’ATTERT : Elle a pris une ordonnance de police administrative imposant une distance de 1.000 mètres par rapport aux habitations, pour toute implantation d’antennes-relais. Cette ordonnance de police décidée à l’unanimité par le Conseil communal du 26/11/1999 porte réglementation de l’installation d’antennes-relais de téléphonie mobile sur le territoire communal. Ce règlement a été considéré comme légalement valable par l’Union des Villes et des Communes.
La commune de GOUVY : Considère dans son ordonnance de police administrative prise en juin 2002 que toute station-relais de mobilophonie/GSM, outre la fait de présenter une garantie d’intégration paysagère optimale, ne peut être implantée à une distance de sécurité intérieure à :
- 310 mètres dans le cas d’un seul opérateur sur le site proposé,
- 440 mètres dans le cas d’un regroupement de deux opérateurs sur le même site,
- 540 mètres dans le cas d’un regroupement de trois opérateurs sur le même site, distances déterminées à partir d’habitation, école et autre bâtiment où des personnes sont susceptibles de séjourner plusieurs heures par jour.
Plusieurs autres communes de Wallonie s’inspirent déjà de ces règlements.
Références bibliographiques
[1] Lettre DGS/VS3 n° 187 du Directeur Général de la Santé et Circulaire UHC/QC/9 n° 99-31 du 15 Avril 1999 du Secrétaire d’Etat au Logement. « Installations de stations de base de téléphonie mobile sur des balcons d’immeubles HLM ». Le Moniteur. 1999, n° 4985, page 438.