A Valladolid (Castille, Espagne) en 2002, le juge ordonne l’arrêt du fonctionnement d’antennes relais endéans les huit jours et le démontage complet des installations dans les trois mois
D’après les journaux “El Norte de Castilla”, “El Pais” et le reportage de France Info du 6.01.2002.
Le Collège Garcia Quintana est implanté en plein centre de Valladolid, à proximité de la cathédrale. A côté de ce collège, se trouve au n° 5 Calle Lopez Gomez, un immeuble de dix étages (une des plus hautes tours du secteur) surplombant toutes les salles de classe et la cour de récréation..
Sur le toit de ce bâtiment, on peut apercevoir un grand nombre d’antennes, dont sept relais de téléphonie mobile.
Trois cas de leucémie infantile, plus un cas de cancer plus récemment se sont déclarés en 10 mois parmi les plus jeunes enfants du collège. Les parents d’élèves exigent le démontage des antennes.
Bien qu’aucun rapport direct de cause à effet n’ait été établi parmi les trois cas de cancers infantiles de l’Ecole Publique Garcia Quintana et les installations de réémission de téléphonie mobile situées sur le toit de l’immeuble sis au n° 5 de Calle Lopez Gomez, le juge du tribunal de première instance a estimé que le risque pour la santé peut être retenu selon la procédure pénale. Suite à l’instruction et aux préventions d’infraction administrative, le juge José Albert Rodriguez Cartwright, suivant en cela le réquisitoire du procureur, a signé l’ordonnance enjoignant à l’opérateur de cesser l’activité endéans les 7 jours ouvrables qui suivent la proclamation du jugement et le démontage complet des installations avant trois mois. Le 24 décembre 2001, un 4ème cas de cancer a été diagnostiqué. Le juge de garde a ordonné l’arrêt immédiat de toutes les antennes avant l’exécution de l’ordonnance précédente.
Les opérateurs sont libres de contester cette ordonnance, ce que feront sans doute leurs services juridiques, mais même s’ils l’emportent, l’ordre prendra tout de même effet à titre de précaution, dès la proclamation du présent jugement.
Les équipements devront être déplacés au moins pendant que dure le recours. Si le dossier devait être classé ou si le recours devait infirmer ce jugement, les compagnies de télécommunications pourraient reconstruire de nouvelles installations, mais on entrerait alors dans une procédure difficile d’attributions de licences où entreraient en jeu divers facteurs. En effet, une autre résolution au niveau provincial implique le principe de précaution, une procédure judiciaire de contentieux administratif et une action de “Téléphonica” contre l’administration municipale qui exige un éloignement d’au moins cent mètres d’une école pour ce type d’installation. Certains, après avoir pris information auprès de sources judiciaires considèrent qu’il est impensable que ces antennes soient replacées sur le toit de Calle Lopez Gomez, parce qu’elles ne remplissent pas les conditions requises lors de l’attribution de la licence de mise en service, car elles sont trop proches de l’Ecole Garcia Quintana. D’autres avocats affirment que cela dépendra de l’avis du Contentieux Administratif et du recours contre le présent jugement.
Recours
La magistrature judiciaire a déclaré qu’elle répond à un recours présenté contre une décision antérieure par laquelle le magistrat avait refusé de prendre des mesures de précaution; bien qu’il y ait prêté attention.. Elle indique que telle est la procédure en cours.
Elle explique que le juge devra pour la révision de sa décision faire appel à des enquêtes actualisées et que lorsqu’il a pris sa première décision, il manquait assez bien de données étant donné que l’instruction. avait débuté très récemment.
Dans les documents de la 2éme instruction, il y a deux points clés. On estime que l’activité qui est exercée sur le toit de cette propriété est considérée comme “un complexe industriel d’importance notoire destiné à implanter des systèmes avancés de télécommunications numériques en vue de l’exploitation de téléphonie fixe par fréquences radio”. Dans le texte juridique, un tel usage de cette installation est assorti du terme attribution de licence ce qui est incompatible avec la classification du bâtiment urbain, objet du litige. En effet, depuis le “Plan général d’aménagement” interdit l’usage industriel dans des propriétés urbaines qualifiées de résidentielles 2, c’est à dire que dans ce cas, au moins 80 % de la superficie sont consacrés à des logements.
Irrégularités
Le juge expose les irrégularités dans la concession de licences et deux en particulier. Il signale que le technicien qualifié qui a émis le rapport concernant toutes les mises en application de la licence a décidé d’écarter les pétitions contestant la légalité de la décision de la ville organisatrice. Il explique qu’il est surpris d’observer que le système si complexe de télécommunications aurait pu être confondu avec une simple antenne collective de télévision et il ajoute “qu’il semble qu’on ait voulu utiliser la propriété en faisant en sorte que la hauteur soit la même”.
Il rappelle aussi que les opérateurs versent 25 millions de pesetas annuellement pour cette mise à disposition et que la position habituelle de scientifiques participant au débat, sur l’innocuité ou la nocivité des émissions électromagnétiques consiste à éviter toute déclaration catégorique dans un sens ou un autre et à tenir compte du facteur de risques. Il mentionne également le code pénal et les conséquences qui en découlent.
Le juge formule dans son arrêt une accusation contre les techniciens municipaux et il évoque le concept de l’infraction de prise de décision sans aucune notion de responsabilité à l’endroit du Conseiller de l’Urbanisme et du Maire de la commune.
Un premier cas traité selon le droit pénal
Sous cet aspect, l’avocat des parents des enfants concernés, Carlos Castro, indique qu’il faudra approfondir l’instruction pour déterminer de nouvelles responsabilités et envisager les chefs d’infractions. Il évalue très positivement le travail du juge et estime qu’il apprécie la rapidité et l’efficacité du travail judiciaire. Il est agréablement surpris de la quantité de données accumulées et de la réponse rapide et efficace du juge.
Pour terminer, il signale qu’il s’agit ici du premier jugement en cette matière, traité en droit pénal, ce qui est un précédent important ouvrant de nouvelles perspectives.
Dernier rebondissement
L’association des voisins de San Benito dans la zone centre, que préside Monsieur Raphaël Fuentes a poussé un cri d’alarme, car cinq cancers sont apparus en moins de deux ans dans le bloc de logements du n°7 de la Calle Lopez Gomez. Il s’agit du bâtiment voisin de l’immeuble n° 5 où est installée la forêt d’antennes.
Le président de l’Association des propriétaires de l’immeuble composé de 23 logements où résident 73 personnes a présenté un texte signé des habitants, manifestant leur inquiétude et leurs préoccupations concernant la politisation du problème. Le président a confirmé que les habitants exigent que les antennes soient démontées et qu’un jugement a été rendu en ce sens. Le texte ne donne pas de détails concernant l’identité des personnes malades, mais on sait néanmoins qu’il s’agit pour la plupart d’adultes.
On connaît par d’autres sources l’existence de plusieurs malades de cancers dans d’autres blocs résidentiels entourant la Place d’Espagne : Teresa Gil 30 et Lopez Gomez 19, par exemple, mais les familles ont demandé une certaine discrétion, étant donné que certaines personnes atteintes ne connaissent pas encore l’existence de leur maladie. Au vu de ce qui s’est passé dans le collège Garcia Quintana, le Président R. Fuentes s’est demandé “si la zone centre allait elle aussi se trouver en quarantaine”. Devant les craintes exprimées, le délégué territorial de la réunion Jesus Garcia Galvan s’est engagé à recevoir les voisins bien qu’il n’ait pas connaissance du nombre de cancers dans les différents blocs.
Les experts reconnaissent que le nombre de cas de cancers ne peut pas être attribué au hasard. Mais ajoutent-ils aussitôt “les émissions des antennes sont-elles en cause?” Le Dr. Alejandro Ubeda, expert en biophysique des radiations non ionisantes veut évaluer la validité des informations scientifiques. Francisco Vargas et lui-même ont été coordonateurs du rapport technique concernant les champs électromagnétiques et la santé publique, rapport commandé par le Ministère de la Santé et publié en mai 2001 (www.msc.es/salud/ambiental/home.htm).
Sept autres personnes possédant les qualifications scientifiques participaient également à ce comité. Le rapport a conclu que l’exposition aux antennes n’est pas nocif pour autant que les émissions restent dans des limites recommandées par la Commission Européenne (entre 450 µW/cm² pour 900 MHz et 900 µW/cm² pour 1800 MHz). “Il s’agit de valeurs préconisées par l’ICNIRP (Comité International de Protection contre les Radiations Non Ionisantes)”, explique Ubeda. “Les antennes émettent à des niveaux bien inférieurs. Si le faisceau principal est dirigé vers un point localisé à 100 mètres et si quelqu’un est directement exposé au faisceau en ce point, il reçoit 1.000 fois moins de radiations que celles imposées par les limites du Ministère de la Santé Espagnol, ajoute cet expert chercheur à l’Hôpital Ramon y Cajal de Madrid.”
“Lorsque ces limites sont largement dépassées, un effet thermique pourrait s’exercer sur les tissus et provoquer un cancer”. Des expérimentations de ce type ont été effectuées sur des souris et sur des cultures de cellules humaines. Mais rien n’a jamais pu être mis en évidence avec les intensités observées à Valladolid.” assure Ubeda.
La Junte de Castille et Leon affirme que des mesures ont été réalisées en trois occasions entre septembre et décembre 2001 et que dans tous les cas de figures les émissions étaient conformes à la législation.
A. Ubeda ajoute: “Il faut tenir compte du développement de quelques années pour ce type de maladie. La première antenne a été placée en novembre 2000 et le premier cas a été diagnostiqué un mois plus tard, le deuxième trois mois plus tard, le troisième en septembre et la quatrième le 24 décembre 2001.”
Par conséquent, la suggestion de cet expert est qu’il faudrait effectuer dès que possible des enquêtes sur d’autres causes possibles de cancers, car à son avis, concentrer son attention sur les antennes pourrait masquer la véritable cause de la maladie des enfants.
La somme des puissances globales des antennes ne peut être la cause si ces puissances sont maintenues dans des limites fixées. Une longue conversation en utilisant un téléphone portable émet des milliers de fois l’intensité d’émission de ces antennes, pendant la même durée d’exposition.
Les institutions régionales ont décidé de mettre en œuvre une commission d’enquête à ce sujet et de faire réaliser des examens médicaux sur tous les étudiants du centre. Les parents demandent une étude épidémiologique, l’enlèvement des antennes et mettent en cause la responsabilité des politiciens régionaux et locaux. Ils n’ont pas confiance à l’étude conduite par la Commission de Santé de la région.
Les mesures effectuées à Valladolid sur les sites concernés indiquaient 20 µW / cm² ( 8,68 V/m)
N.B.: Dans la Municipalité de Ronda, près de Marbella, cinq cancers viennent d’être diagnostiqués parmi 3.000 élèves de trois écoles. Un pylône de 40 mètres de hauteur portant plusieurs antennes est proche de ces écoles!
Nous venons d’apprendre que dans le collège de Ronda, trois personnes sont entre temps décédées de leucémie (deux professeurs et une étudiante de 20 ans).
Sur le territoire de la Municipalité de Montilla (Andalousie), les autorités ont prié deux opérateurs de démonter leurs antennes dans les deux mois.
Les mesures effectuées sur site à Ronda indiquaient 8,3 µW/cm² (5,6 V/m).
Dans la région d’Elche (près de Murcia, Andalousie), à proximité d’une importante concentration d’antennes, cinq nouveaux cas de cancers sont apparus à proximité de la Plaza l’Algeps, dans des bâtiments adjacents. Ceci porte à 14 les nouveaux cas de cancers récemment apparus à Elche.
Les mesures réalisées sur sites indiquent 2,2 Volts/m . On a mesuré 4,4 Volts par mètre dans un appartement où deux femmes ont été victimes d’avortements spontanés l’année dernière.
A Cordoba (Andalousie), trois cas de cancers ont été diagnostiqués dans des écoles situées à proximité d’antennes de téléphonie mobile. Ce 11 janvier, la Municipalité de Cordoba a exigé le démontage de toutes les antennes situées sur quatre centres d’éducation, sur un hôpital et sur une maison de repos.
Commentaires de J.M. Danze, consultant en Biophysique
Le Dr. A. Ubeda passe sous silence un certain nombre de choses:
1. Les seuils admis par la recommandation de la Commission Européenne (450 µW/cm² pour les fréquences de 900 MHz et 900 µW/cm² pour les fréquences de 1800 MHz) sont un choix arbitraire. Comme le texte de la Commission Européenne l’indique, ces seuils ne sont basés que sur les effets thermiques (dégagement de chaleur sous l’effet des ondes). On a pris une valeur limite inférieure en densité de puissance pour laquelle des effets thermiques sont reconnus pour l’homme et l’animal et on a divisé la valeur par 50. La Commission Européenne a ainsi fixé les limites mentionnées ci-dessus. Elle s’est basée en cela sur les recommandations du Comité International de Protection contre les Radiations Ionisantes (ICNIRP), une organisation non gouvernementale où les Industriels ont la main sur le fonctionnement.
2. Il faut savoir que les industriels de la téléphonie mobile ont fait adopter via l’ICNIRP la recommandation européenne (émanant de la D.G.5 ! ! !). Et maintenant ils tentent de prouver que les niveaux d’exposition ainsi détermineés sont inoffensifs pour le public ! Pour cela, ils utilisent tous les artifices et les moyens que leur puissance financière leur permet.
3. Rien ne nous indique qu’aucun risque pour la santé n’existe en dessous de ces valeurs arbitraires. L’étude de R. Santini et al. (La Presse Médicale, 3.11.2001) montre que les riverains d’antennes ont déjà des problèmes jusqu’à 300 mètres des antennes, c’est à dire entre 0,1 µW /cm² et 0,3 µW/cm².
4. Toutes les études étayant les valeurs limites recommandées par la Commission Européenne ne prennent en compte que les études en laboratoire de l’exposition aux ondes porteuses 900 MHz et 1800 MHz (ondes continues). Or, dès le 27.12.1994, le Prof. W.R. Adey, Président du Conseil Américain de Protection contre les Radiations (émanation de l’E.P.A.,USA) a expliqué lors du Symposium du Parlement Européen à Londres “Un consensus scientifique croissant concernant les interactions entre biologie cellulaire et moléculaire et les champs électromagnétiques de l’environnement. Emissions électromagnétiques: les dernières preuves scientifiques, nuisances potentielles et stratégie en vue de réduire le risque.”, que les hautes fréquences deviennent beaucoup plus nocives pour les êtres vivants lorsqu’elles sont modulées en basses fréquences. Mais ces effets se situent bien en deçà des effets thermiques. Les recherches sur les ondes porteuses seules (ondes continues) n’ont donc aucun sens et masquent la vérité.
Ceci se confirme par les travaux du Prof. Leif Salford (Univ. de Lund, Suède) sur le franchissement de la barrière sang/cerveau où les ondes sont modulées en trains d’impulsions de 2, 8 et 18 Hz comme elles le sont pour les téléphones mobiles et les antennes relais. Selon cette étude, il semble à première vue que la nocivité de l’onde dans ces conditions ne soit pas liée à son intensité et que même à des densités de puissance de 2,5 µW/cm², l’effet est aussi important.
5. Un autre point n’est pas non plus pris en compte: c’est la sensibilité individuelle des patients à certains types de fréquences. Cela échappe totalement aux notions statistiques. Or, ici, on a affaire non pas à une population exposée volontairement (cas des utilisateurs de téléphones mobiles), mais à une exposition imposée à toute une population pour laquelle il est impossible de se protéger, où qu’elle aille. Actuellement, le Service de Santé Publique de Californie USA (P. Levallois et al.), admet dans une étude récente qu’en Californie, 120.000 personnes ont dû abandonner leur profession pour cause de sensibilité électromagnétique. Le Prof. Madeleine Bastide (Univ. de Montpellier, F), Le Prof. Georges Hyland (Univ. de Warwick, G.B.), le Prof. Cyril W. Smith (ex. Univ. Salford, G.B.), le Prof. W. Rea (Univ. du Texas U.S.A.), le Prof. Olle Johansson (Institut Karolinska, Stokholm, Suède), le Prof. Pierre Le Ruz (Rennes), le Prof. R. Santini (Villeurbanne-Lyon, France) insistent dans leurs travaux sur l’importance de la modulation en basses fréquences (impulsions) et sur la notion de sensibilité individuelle qui apparaît, mais dont il est impossible d’appréhender la portée dans des études statistiques non conçues en fonction de ce facteur. Madame L. Bonhomme-Faivre de l’Institut Paul Brousse à Villejuif indique également dans plusieurs publications l’importance de la sensibilité individuelle aux champs électromagnétiques dans ce type d’études.
6. Prétendre qu’en réalisant des études uniquement basées sur des concepts d’effets des ondes porteuses, c’est tromper le public. N’oublions pas que les champs d’ondes émis par les antennes relais sont des ondes porteuses sur lesquelles sont modulées des bouffées d’impulsions en basses fréquences, lesquelles basses fréquences peuvent interférer avec les ondes en basses fréquences propres au cerveau.. L’utilisation d’un mannequin rempli d’un gel pour modéliser les effets sur la santé n’a donc aucun sens et ne permet de prendre en compte que les effets thermiques. Nous en sommes loin ici, car il s’agit d’effets spécifiques à faible niveau d’intensité. W. R. Adey et son équipe ont montré que des cellules sont capables de percevoir des intensités de champs électriques de l’ordre du millionième de Volt/m, lorsque la fréquence correspond à la fréquence propre du système vivant.
7. Il est anormal que l’ICNIRP et l’OMS écartent systématiquement de l’ensemble des publications qu’elles reprennent en référence, les publications montrant des effets à des niveaux non thermiques, même si ces publications proviennent d’institutions ayant une réputation de sérieux.